Lui
J'aurais voulu connaître ce sourire.
J'aurais voulu connaître ces mains.
Celles qui m'ont porté. Celles auxquelles je me suis accrochée. Peut-être même celle qui m'ont nourri. Mais aussi ces mains qui ont retourné la Terre. Celles qui ont tenu un fusil bien droit devant Lui. Celles qui se sont crispées dans la douleur. Il ne les a jamais giflé il parait. A part une fois, une seule. Elle avait dépassé les limites. Ca n'est jamais arrivé sinon. Ces mains qui ont tenu trop de bouteilles je crois.J'aurais voulu connaître ces yeux.
Ceux qui ne disaient jamais non. Ceux qui parlaient d'eux-mêmes. Ceux qui lui disaient "Je t'aime" à Elle. Ces yeux qui m'ont effleuré la peau. Ceux qui m'ont couvert d'amour, je crois. Ceux qui ont vu la guerre et les Allemands. Ceux qui ont vu le reflet de Lui-même dans le miroir. Que pensait-il? Qu'aurait-il dit s'il me voyait aujourd'hui? Ses yeux seraient-ils toujours aussi brillants?J'aurais voulu connaître le son de cette voix.
Celle qui chantait "Sur la Mé" et des tas d'autres chansons plus longues les unes que les autres, dont j'ai oublié les titres mais que j'écoute toujours comme une gosse, fascinée, à chaque réunion de famille. Cette voix qu'ils connaissent presque tous. Qui leur semble si familière. A moi aussi pourtant. Même si je ne fais que l'imaginer. Celle qui prévenait toujours de la sanction sans jamais l'appliquer. Celle qui m'a fait mille recommandations avant l'heure. Celle qui m'a fait sourire j'en suis sûre.J'aurais voulu connaître cette odeur.
Cette odeur de vin quand il remontait de la cave. Celle de son parfum le dimanche pour aller à l'office. Celle de ses mains couvertes de terre. Celle laissée sur l'oreiller. Je me suis si souvent fourrée le nez dans son oreiller dans l'espoir de sentir quelque chose, comme s'il y avait laissé une trace, comme si les lavages successifs n'avaient rien pu y faire. Mais je n'ai jamais rien senti d'autre que son odeur à Elle. J'aurais voulu le connaître Lui.
Celui dont on me parle depuis si longtemps. Celui que je crois connaître. Celui qui récoltait toujours le "gras" du jambon. Mes cousines refusaient toujours de le manger. Il siègeait en haut de la table à chaque repas. Il riait fort. Il parlait de politique, disait que c'était tous les mêmes de toute façon. Il jouait avec nous, s'appuyait sur ses genoux éreintés de fatigue et faisait rouler les petites voitures, coiffait les poupées. Il agitait mon hochet pour que je remue le bout de mon nez. Il disait toujours de revenir, qu'il y en a toujours assez pour tout le monde. Il lisait le journal, peut-être. Il faisait crédit. Il avait fait la Guerre aussi. Il racontait ses aventures des fois, du bout des lèvres, discrètement, avec pudeur. Enfin je crois. Je ne sais pas en fait. J'aurais voulu pouvoir dire tout cela avec tellement plus de certitude. Ses filles lui ressemblent, on dit. Son fils aussi. Et puis aussi, il m'embrassait sur le front chaque fois avant de partir, comme pour la dernière fois.
Il est celui dont on dit que j'ai été le dernier Soleil.
Il est celui qui fait pleurer mon Papa. Il m'aimait il parait.
Parce que cette chanson nous ressemble un peu, en certains points.
Et puis pas d'illustration. Parce que pas de modèle.
Et pas question de quelqu'un d'autre que Lui.
[J'ai trouvé Lui. Une vieille photo. Je l'adore. Allez chercher pourquoi]
[A tous ceux partis trop tôt et qui ne nous ont pas laisser le temps de les connaître]
Il est celui qui fait pleurer mon Papa. Il m'aimait il parait.
Parce que cette chanson nous ressemble un peu, en certains points.
Et puis pas d'illustration. Parce que pas de modèle.
Et pas question de quelqu'un d'autre que Lui.
[J'ai trouvé Lui. Une vieille photo. Je l'adore. Allez chercher pourquoi]
[A tous ceux partis trop tôt et qui ne nous ont pas laisser le temps de les connaître]